Je co-organise avec Joëlle Le Marec (un autre lien ICI) une journée intitulée "SAVOIRS DE LA MUSIQUE, ÉTUDE DE SCIENCES, RÉSONANCES le 27 octobre de 9h 30 à 18 h à la Maison de la Recherche à Paris IV Sorbonne 28 rue Serpente, salle 001 métro Saint-Michel.
On y entendra des chercheur-es venues d'horizons différents et on y
débattra de la relation sciences/ musique. Je reproduis ci-dessous la
liste des intervenant-es et la présentation de la journée :
Intervenants :
Emilie DaLage (Université Charles de Gaulle, Lille)
François Debruyne (Université Charles de Gaulle, Lille)
Judith Dehail (CELSA Paris 4 Sorbonne)
Guillaume Heuguet (CELSA Paris 4 Sorbonne)
Joëlle Le Marec (CELSA Paris 4 Sorbonne)
François Ribac (Université de Bourgogne Franche-Comté)
Angelica Rigaudière (Université de Reims Champagne Ardennes)
Olivier Soubeyran (Université de Grenoble)
Emilie DaLage (Université Charles de Gaulle, Lille)
François Debruyne (Université Charles de Gaulle, Lille)
Judith Dehail (CELSA Paris 4 Sorbonne)
Guillaume Heuguet (CELSA Paris 4 Sorbonne)
Joëlle Le Marec (CELSA Paris 4 Sorbonne)
François Ribac (Université de Bourgogne Franche-Comté)
Angelica Rigaudière (Université de Reims Champagne Ardennes)
Olivier Soubeyran (Université de Grenoble)
Basile Zimmerman (Université de Genève)
Peut-on rapprocher les études de musique et les études de sciences ? Comment les examiner, les
penser, les comparer et même saisir leurs interactions ? Voici quelques-unes des questions que
nous aimerions poser lors de cette journée d'études du 27 octobre 2016.
penser, les comparer et même saisir leurs interactions ? Voici quelques-unes des questions que
nous aimerions poser lors de cette journée d'études du 27 octobre 2016.
À
priori la relation ne va pas de soi. L'étude de la musique, en
particulier de larges pans de la musicologie, peut sembler enclavée et
réservée à des spécialistes qui s'efforcent surtout de faire parler la
musique “en elle-même”. Une approche souvent confortée par la conviction
répandue que seuls les musiciens pourraient comprendre la musique.
Évidemment, si la musique n'a de sens que par elle-même il est logique
que seul-es ceux et celles qui la connaissent l'analysent. De façon
symétrique, le vaste champ interdisciplinaire des études sur les
sciences peut également être perçu comme auto centré, principalement
attaché à mettre à jour les conditions de production et de diffusion
(matérielles et intellectuelles) de la pratique et des savoirs
scientifiques et à rendre compte des institutions, pratiques et objets
qui y concourent. La dissemblance n'est en fait qu'apparente et les
points de convergences sont nombreux.
En premier lieu, il est intéressant de comparer les théories et les pratiques (externes autant
qu'internes) qui justifient l'enclavement de chacun de ces deux mondes. Par quels processus sociaux les sciences dures (et notamment l'épistémologie) et la musicologie se sont-elles constituées comme des pratiques autonomes, séparées des autres disciplines scientifiques et se sont présentées comme bien trop complexes pour que la société n'y mette son nez ? Dans un même ordre d'idées, comment la musicologie traditionnelle et ses alliés (compositeurs, éditeurs, critiques, enseignants) s'y sont-ils pris pour constituer la musique (classique et contemporaine) comme une chose tout à la fois scientifique et organiquement liée à des phénomènes naturels ? Une sorte de “science dure” se différenciant des autres arts et des sciences humaines. Dans ce processus théorique et matériel de constitution de ses deux champs, il est patent que chacun a ponctuellement croisé l'autre pour se conforter : ainsi la musique a longtemps servi de métaphore et d'outil aux savants et aux philosophes pour décrire l'organisation et les secrets de l'univers. De même, la mathématisation (et même la « pythagorisation ») de la musique, sa technicité, ses langages formalisés, ses liens avec l’ingénierie, en font un objet pour les scientifiques et en particulier pour les disciplines qui cherchent à démontrer la suprématie du cerveau. Cette première problématique, celle de “l'autonomie symétrique”, nous semble être une première piste de travail.
La deuxième piste qui nous semble fructueuse, celle de la convergence assumée, est à deux
temps. Elle consiste, d'une part, à repérer les dialogues et les croisements théoriques que les approches pluridisciplinaires des musiques et des sciences ont tissé. On sait par exemple que la musique (en tant que pratique sociale) a nourri une théorie des médiations qui s'applique à toutes les démarches de connaissance et que plus généralement ses formes d'organisations sociales peuvent constituer des sortes de modèles pour aborder le monde social, voire le transformer. De même, le caractère sensible, implicite des savoirs de la musique (les modes de transmission des savoirs du corps, de la sociabilité) fait écho à des conceptions du savoir proprement culturelles, très éloignées d'une norme (ou d'une esthétique) de la scientificité « dure » et proches des préoccupations d'une anthropologie des savoirs ordinaires.
D'autre part, et à l'inverse, l'observation et l'histoire des objets, des espaces, et les procédures par
lesquelles les savoirs scientifiques et médicaux sont (et ont été) produits peut contribuer à l'étude de la
musique où justement les objets -qu'il s'agisse de production ou de consommation- sont si importants et si âprement débattus. Dans une telle approche, un laboratoire ou une association de patients peuvent contribuer à mieux comprendre un studio d'enregistrement ou le Peer to Peer. Plus généralement, il est certain que les processus de rationalisation des pratiques et d'industrialisation des modes de production ont bien affecté la musique et la science et que ces manières questionnent tout à la fois ce qui relève de la critique et de la compréhension de ces phénomènes.
Enfin, cette journée d’étude est elle-même issue d'un ensemble de dialogues et d'échanges entre
des chercheur-es qui, d'un côté, s'intéressent aux pratiques musicales contemporaines ou anciennes, et de l'autre côté, sont préoccupés par les modes de production des savoirs scientifiques. Ces échanges sont fourmillants d'échos, de résonances, de ressemblances souvent plus ressenties que formalisées, et sur lesquelles nous souhaitons nous arrêter et réfléchir collectivement. Ces discussions portent sur les
tournures de recherche, les façons d'étudier des pratiques avec lesquelles on a par ailleurs des liens non académiques (en praticien, amateur, acteur critique ou militant, etc.), une inquiétude heuristique nourrie par l'impossibilité de stabiliser une position d'extériorité politique ou culturelle par rapport à nos objets, une passion pour des démarches de recherche élaborées dans l'oscillation permanente entre ce que nous font les relations intimes que nous avons avec nos objets (des pratiques, les sociabilités) et le goût partagé pour l'approche analytique, qui est sans cesse à retravailler collectivement. Dans les deux cas, l'impossibilité de dissocier les enjeux proprement scientifiques des enjeux culturels ou politiques, n'ont paspour conséquence un affaiblissement du projet de recherche, bien au contraire, et c'est là certainement une des énigmes dont nous partageons le trouble, et le bénéfice.
En premier lieu, il est intéressant de comparer les théories et les pratiques (externes autant
qu'internes) qui justifient l'enclavement de chacun de ces deux mondes. Par quels processus sociaux les sciences dures (et notamment l'épistémologie) et la musicologie se sont-elles constituées comme des pratiques autonomes, séparées des autres disciplines scientifiques et se sont présentées comme bien trop complexes pour que la société n'y mette son nez ? Dans un même ordre d'idées, comment la musicologie traditionnelle et ses alliés (compositeurs, éditeurs, critiques, enseignants) s'y sont-ils pris pour constituer la musique (classique et contemporaine) comme une chose tout à la fois scientifique et organiquement liée à des phénomènes naturels ? Une sorte de “science dure” se différenciant des autres arts et des sciences humaines. Dans ce processus théorique et matériel de constitution de ses deux champs, il est patent que chacun a ponctuellement croisé l'autre pour se conforter : ainsi la musique a longtemps servi de métaphore et d'outil aux savants et aux philosophes pour décrire l'organisation et les secrets de l'univers. De même, la mathématisation (et même la « pythagorisation ») de la musique, sa technicité, ses langages formalisés, ses liens avec l’ingénierie, en font un objet pour les scientifiques et en particulier pour les disciplines qui cherchent à démontrer la suprématie du cerveau. Cette première problématique, celle de “l'autonomie symétrique”, nous semble être une première piste de travail.
La deuxième piste qui nous semble fructueuse, celle de la convergence assumée, est à deux
temps. Elle consiste, d'une part, à repérer les dialogues et les croisements théoriques que les approches pluridisciplinaires des musiques et des sciences ont tissé. On sait par exemple que la musique (en tant que pratique sociale) a nourri une théorie des médiations qui s'applique à toutes les démarches de connaissance et que plus généralement ses formes d'organisations sociales peuvent constituer des sortes de modèles pour aborder le monde social, voire le transformer. De même, le caractère sensible, implicite des savoirs de la musique (les modes de transmission des savoirs du corps, de la sociabilité) fait écho à des conceptions du savoir proprement culturelles, très éloignées d'une norme (ou d'une esthétique) de la scientificité « dure » et proches des préoccupations d'une anthropologie des savoirs ordinaires.
D'autre part, et à l'inverse, l'observation et l'histoire des objets, des espaces, et les procédures par
lesquelles les savoirs scientifiques et médicaux sont (et ont été) produits peut contribuer à l'étude de la
musique où justement les objets -qu'il s'agisse de production ou de consommation- sont si importants et si âprement débattus. Dans une telle approche, un laboratoire ou une association de patients peuvent contribuer à mieux comprendre un studio d'enregistrement ou le Peer to Peer. Plus généralement, il est certain que les processus de rationalisation des pratiques et d'industrialisation des modes de production ont bien affecté la musique et la science et que ces manières questionnent tout à la fois ce qui relève de la critique et de la compréhension de ces phénomènes.
Enfin, cette journée d’étude est elle-même issue d'un ensemble de dialogues et d'échanges entre
des chercheur-es qui, d'un côté, s'intéressent aux pratiques musicales contemporaines ou anciennes, et de l'autre côté, sont préoccupés par les modes de production des savoirs scientifiques. Ces échanges sont fourmillants d'échos, de résonances, de ressemblances souvent plus ressenties que formalisées, et sur lesquelles nous souhaitons nous arrêter et réfléchir collectivement. Ces discussions portent sur les
tournures de recherche, les façons d'étudier des pratiques avec lesquelles on a par ailleurs des liens non académiques (en praticien, amateur, acteur critique ou militant, etc.), une inquiétude heuristique nourrie par l'impossibilité de stabiliser une position d'extériorité politique ou culturelle par rapport à nos objets, une passion pour des démarches de recherche élaborées dans l'oscillation permanente entre ce que nous font les relations intimes que nous avons avec nos objets (des pratiques, les sociabilités) et le goût partagé pour l'approche analytique, qui est sans cesse à retravailler collectivement. Dans les deux cas, l'impossibilité de dissocier les enjeux proprement scientifiques des enjeux culturels ou politiques, n'ont paspour conséquence un affaiblissement du projet de recherche, bien au contraire, et c'est là certainement une des énigmes dont nous partageons le trouble, et le bénéfice.
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