samedi, juillet 28, 2007

Entretien (disponible en ligne) avec le journaliste Philippe Astor


J'ai récemment été interviewé par Philippe Astor, journaliste, pour la revue Musique Infos Hebdo. L'entretien s'intitule : « Les éditeurs ont perdu le monopole de la reproduction de musique à grande échelle »
Philippe Astor est un obervateur attentif et averti des (r)évolutions de l'industrie musicale et des façons d'aimer la musique. Son blog, digital jukebox
regorge d'infos et d 'hypothèses.

mardi, juillet 17, 2007

Rapport de recherche en téléchargement !

Mon étude, intitulée la circulation et l'usage des supports enregistrés dans les musiques populaires en Ile de France, est achevée et disponible (au format pdf) sur le site de "Culture et territoires" ICI

L'étude a été financée par le programme interministériel “Culture et Territoires en Ile de France“, le bureau des Ecritures de la Direction de la Musique, du Théâtre et de la Danse du Ministère de la Culture et le Conseil général de Seine-Saint-Denis

PODCAST #1 ENTRETIEN AVEC ANDY PARTRIDGE (XTC)


Hommage aux mages
À la fin de son livre “ La passion musicale “, le sociologue Antoine Hennion évoque la mort de JS Bach. Avant d’expirer, le Cantor dicte un choral à son beau-fils, intitulé “ Vor deinem thron ”(de ton trône). Le motif sol sol la si, la si do si la, sol est il seulement une succession de notes ou une allégorie de l’ascension vers Dieu auquel se prépare le croyant Bach ? Il est tout aussi bien les deux à la fois : le mouvement ascendant des notes sol sol la si, et la transposition du motif initial sol la si en la si do exprime aussi bien la montée sur l’échelle musicale que le chemin vers le paradis. La musique est cet "entre-deux" qui nous fait imaginer l'au-delà.
Dans un autre (bon) livre consacré à Bach, “De Jean Sébastien Bach à Glen Gould“, Denis Laborde (anthropologue et musicien) décrit les moyens musicaux et dramatiques employés par le compositeur comme des outils de persuasion. Ainsi, pour Hennion et Laborde, la musique est un passage entre deux mondes, celui du néant et des vivants, le mouvement qui nous emmène des “pures“ notes de musique à l'imaginaire.

Carrefours et passages
Cette importance du passage vaut tout aussi bien pour le groupe anglais XTC, une formation fondée en 1977 par quatre anglais originaires de la ville anglaise de Swindon.
“ Jason and the argonauts ”, un morceau de 1982, débute par un motif ascendant et descendant sol la si do# ré do# si la qui évoque irrésistiblement le mouvement des vagues. Pour raconter l’expédition nautique des argonautes et la conquête de la toison d’or, à la façon de son illustre prédécesseur Jean-Sébastien, Andy Partridge invente une image musicale qui nous fait entendre le ressac… En entendant les guitares acoustiques, puis la basse tout au long du morceau, jouer le motif d'ouverture, j'imagine la mer et le vaisseau des valeureux grecs. Avec cet exemple rapporté par Andy Partridge dans ce premier podcast et qu'il décrit comme son paradigme ("for me all is pictural“ ), le décor est planté : XTC est un groupe de passeurs, un lieu où se rencontrent de nombreuses contrées –qu’elles soient stylistiques, géographiques, picturales, émotionnelles-.
Ce goût pour les rencontres a peut-être une cause géographique : la ville de Swindon fût en effet au XIXe siècle, elle aussi, un lieu de passage ; toutes les marchandises, les humains, les animaux, les livres, les victuailles destinés à Londres transitaient par ce carrefour stratégique, véritable nœud ferroviaire de l'Angleterre. On retrouve d’ailleurs l’écho de cette époque (révolue) dans la photo de pochette de l’album “ Big Express ” ornée d'une roue de chemin de fer et où, habillés en cheminots, les membres du groupe posent devant une locomotive à vapeur.


Vient alors une image, évoquée par Michel Serres dans un de ses livres.
- “ vous souvenez vous des rotondes, ces bâtiments circulaires des anciens chemins de fer ?
(...) Pour réparations, les locomotives quittaient leur rail pour se placer sur un plateau rond, mobile et formant pivot, et, ainsi, après l’entretien, pouvaient, à loisir, emprunter n’importe qu’elle autre direction parmi tous les rails , disposés en étoile autour de cette rotonde. En avant, en arrière, à gauche ou à droite, vers Strasbourg ou vers Bordeaux, après ou pendant, que sais-je, les locomotives haletaient dans le possible. N’ayant aucun sens par lui-même, le plateau pouvait tourner dans tous les sens..
[in La légende des anges de Michel Serres. Page109,110. Editions Champs/Flammarion.1999]
XTC est une véritable plate-forme de rencontres, un échangeur, un terminal d'émotions.

Innovation et cosmopolitisme
Cependant, même si XTC est le groupe de Swindon (la pop music est une affaire locale en Angleterre), il est ouvert au monde. Depuis le début de leur carrière, ses membres piochent dans la culture musicale internationale. On retrouve dans leur musique des traces de free-jazz, du Stravinsky de l’Histoire du soldat, les harmonies vocales de Bing Crosby, les trompettes des Novelties (la pop des années cinquante qu'Andy écoutait à la radio), le rock'n roll, et bien d’autres choses encore… Leur nostalgie de l’enfance et des locomotives de l’époque victorienne ne les empêche pas d’être une formation avide d’expérimentation sonore, passionnée par les ressources des studios d’enregistrement. De fait, les musiciens d’XTC aiment autant les antiquités que les objets techniques : pas seulement les soldats de plomb et les aquarelles qui décorent la maison d’Andy mais aussi les guitares électriques, les potentiomètres, les compresseurs/limiteurs, tous les instruments et les machines qui définissent un-e musicien-n-e d’aujourd’hui. C’est d’ailleurs, essentiellement grâce à ses disques et par l’activité de producteur d’Andy Partridge que l’influence d'XTC s’est exercée sur, au moins, deux générations de musiciens (ennes). Car, en 1982, il y a déjà vingt ans, fatigués des tournées de promotion, le groupe décida, à la façon des Beatles, de renoncer à la scène. Il en découla un changement de perspectives : le studio d’enregistrement devint leur seul et unique atelier de travail : orchestrations, arrangements (un mot parfait pour un groupe de passeurs…), innovations techniques, apports d’instruments classiques furent désormais leur marque de fabrique. Une activité de création que le vocabulaire de la musique populaire décrit, à raison, comme le processus de production, son faire.

Toujours et encore
Vingt-cinq ans après la création du groupe, l'œuvre singulière et pourtant si ouverte au monde d'XTC a toute sa pertinence. Tout à la fois anglais et cosmopolites, artisans et ingénieurs high tech, les miniatures musicales des “swindoniens“ ont influencé bien des artistes et leur éthique est admirée, souvent au-delà du rock. La musique d’XTC est typique de notre époque par son hybridité : elle emprunte au rock’n’roll son énergie mais est déposée sur des supports enregistreurs, réalisée dans des studios bourrés d’outils où, pourtant, résonnent les violons et les guitares acoustiques pastorales (comme disent les journalistes). Les thèmes de leurs chansons parlent aussi bien de souvenirs intimes, de romances que de la barbarie des autodafés ou de personnages mythologiques. La somme des albums de XTC a construit, pièce par pièce, une œuvre de près de vingt disques en forme de kaleidoscope, un objet qui pourrait fort bien être l’emblème d’un groupe qui aime tant les volutes de la période psychédélique.

Le podcast (en deux parties) qui suit a été enregistré en avril 2002 à Swindon, chez Andy Partridge, au moment où je préparais mon livre "l’avaleur de rock" et grâce à Martin Newell (thanks dear mate) qui a permis la rencontre. Les questions étaient posées en français et traduites par un jeune critique musical (Gilda) de chez Pop News. Andy répondait en anglais.
J'avais proposé à Gilda de m'accompagner car j'avais peur que mon anglais soit trop étriqué. Mais si Andy s'exprime avec beaucoup de verve (parfois il chante aussi), son anglais est parfaitement compréhensible pour des "amateurs". Tour à tour, il évoque l’importance primordiale des images dans sa façon d’approcher et de sentir la musique, sa relation à la musique classique, sa conception du style musical, son enfance, pourquoi il collabore avec des arrangeurs, ce que “pop“ veut dire, l’industrie musicale, comment il compose, que signifie travailler en groupe, produire, l’histoire d’XTC…. L'entretien dure plus de deux heures et est décomposé en deux fichiers.

Trois autres podcasts suivront prochainement. Réalisés à la même époque, on y retrouvera trois autres de mes héros musicaux, Cathal Coughlan, Sean O' Hagan et Martin Newell.

Podcast A Partridge 1
Podcast Andy Partridge 2